La santé est reconnue comme un droit fondamental par de nombreux traités internationaux et comme un facteur essentiel dans l’amélioration des conditions de vie des personnes. Pour autant, d’énormes inégalités persistent dans l’accès aux services sanitaires : dans le monde, des centaines de millions de personnes en sont privées, dont les membres des groupes Emmaüs et les populations avec qui ils travaillent. 

Pour faire face à cette réalité, Emmaüs International a décidé de s’engager, à partir de 2002, dans la création de mutuelles de santé dans les pays les plus dépourvus de structures sanitaires, jouant ainsi le rôle d’une sécurité sociale de base. Les premiers projets sont nés au Burkina Faso et au Bénin, puis en Inde et au Bangladesh à partir de 2011, avec l’ambition d’aller au-delà de la simple délivrance de prestations de soins : il s’agissait de construire un système de protection sociale communautaire, maîtrisé par les mutualistes bénéficiaires et permettant l’accès aux soins sans endettement. Pour ce faire, les mutuelles se sont construites dans l’indépendance de tout pouvoir (économique, syndical ou politique), avec une gouvernance démocratique. Elles ont en outre instauré un principe de solidarité, non seulement entre les mutualistes qui partagent le risque santé, mais aussi à l’échelle du mouvement international Emmaüs, où les autres groupes contribuent au soutien de ce programme : en effet, si chaque mutuelle compte sur les cotisations de ses membres pour fonctionner, ces revenus sont encore insuffisants en raison de la pauvreté. Celle-ci atteint parfois des niveaux extrêmes, comme dans le cas de la mutuelle indienne (voir encadré). Au Burkina Faso toutefois, les cotisations et subsides locaux couvrent jusqu’à 70 % des besoins. 

Cela dit, la quête de l’autonomie financière est une promesse de pérennité pour ces mutuelles, même si elle ne constitue pas un objectif en tant que tel. Elle permet également d’envisager un élargissement des prestations de santé en œuvrant à la baisse de leur prix, rarement régulé par l’Etat, qu’il s’agisse des médicaments ou des actes médicaux. La gouvernance des mutuelles doit aussi faire l’objet d’efforts continus, car l’implication des membres dans son fonctionnement ne va pas toujours de soi, pas plus que la décision de dédier une part de ses revenus, déjà très faibles, à un fonds mutualisé dont on n’aura peut-être pas besoin… À dire vrai, l’utilité de ces mutuelles pour la collectivité est devenue indéniable. Elle a même été largement démontrée lors des moments les plus pénibles de la pandémie de Covid-19, où elles ont pu jouer, au-delà de leur fonction sanitaire, un rôle de renfort social auprès des plus démuni·e·s.